mardi 4 février 2014

L ‘ALIMENTATION DANS LES SPORTS D’ENDURANCE… 10 IDEES RECUES

L’alimentation est un sujet sensible, elle touche à l’intimité de chacun, entre les habitudes familiales, régionales, les contraintes matérielles et de temps, elle doit pour autant composer avec les exigences de l’activité physique, car si nous mangeons par nécessité et par plaisir, on se met à table aussi pour pouvoir aller courir. Sur l’alimentation de nombreux paradigmes sont là et pèsent comme autant de certitudes et d’interdits, des modes plus diffuses apparaissent aussi…tentons de faire un point sur 10 idées reçues qui font l’actualité ! 

Par Laurent ARDITO

1 / Nous sommes tous allergiques au gluten… peut être ! Le gluten, du latin glu (colle), est une masse protéique que l’on trouve dans les grains de plusieurs céréales, dont le blé, l’orge et le seigle. Ces caractéristiques élastiques et visqueuses font qu’on l’utilise dans de nombreux  produits d’alimentation, car il donne  une texture moelleuse aux produits de boulangerie, aux pâtes , mais aussi à une multitude de préparations alimentaires comme le jambon sous vide, les yogourts aux fruits, les sauces tomates, les viandes en conserve, le chocolat …et la bière !Il existe bien une véritable allergie au gluten, c’est la maladie cœliaque qui touche environ 1 % de la population. C’est une maladie chronique qui empêche l’absorption des nutriments, des vitamines et des minéraux au niveau de l’intestin. L’organisme et le système immunitaire perçoivent le gluten comme dangereux et en le détruisant, s’attaque aux parois de l’intestin grêle, détruisant ainsi les villosités internes et les capacités de digestion de celui-ci. Le sujet se trouve ainsi exposé à la dénutrition et dans les cas les plus graves, à l’anémie et l’ostéoporose . Dans d’autres cas plus grave, le gluten est perçu par le système immunitaire, sensé ne détruire que les bactéries et les virus, comme allergène et peut entraîner des réactions allant de la rhinite, la conjonctivite, l’eczéma, l’urticaire ou le choc anaphylactique… Seule une diète totale du gluten peut résoudre le problème.
En dehors de cette intolérance chronique qui reste rare, on a repéré de nombreux cas, en particulier chez les sportifs d’endurance qui sollicitent intensément leur système digestif, des problèmes d’intolérance au gluten plus diffus. Dans ces cas assez courants, on a constaté de légères irritations de l’intestin, qui conjuguées à l’effort et aux vibrations mécaniques de la course à pieds , peuvent donner des troubles comme des malaises intestinaux, des diarrhées, des renvois, bien connus dans la fin des épreuves longues. La réduction ou la suppression du gluten en particulier dans les phases d’approche d’objectif donne d’assez bons résultats. On peut bien sur  faire un dépistage avec un test  sanguin, où l’on va détecter le taux d’anticorps (anti-endomysium, anti-transglutaminases) qui vont déterminer le niveau d’intolérance ou d’allergie. Mais si l’on a des doutes, justifiés par des problèmes récurrents, on peut aussi faire une diète volontaire et ponctuelle et observer les réactions de son corps à l’effort. Par précaution, dans tous les cas, même chez les individus sains et ne présentant aucun trouble, on aura toujours intérêt à limiter le gluten dans les recharges glucidiques dans les jours précédents une épreuve, en privilégiant les hydrates de carbone de remplacement comme les pommes de terre, le riz et les légumineuses, afin de limiter les inflammations potentielles de l’intestin.
2/ Le lait est indigeste chez l’adulte…peut être ! Cet autre aliment sacré, puisqu’aliment premier, pose aussi quelques problèmes. Certaines idées circulent à son sujet, comme le fait « qu’aucune espèce animale ne boit le lait d’une autre espèce », ce qui est faux, car si les humains tolèrent mal parfois le lait de vache,  le lait de chèvre et de brebis, ne semblent pas provoquer d’ intolérances. En fait il y a bien des intolérances à ces laits (comme au « lait de soja » d’ailleurs) mais moins fréquentes, car ils sont moins consommés. Cela étant ils restent quand même moins allergisants…
Il  faut distinguer les réactions anormales du système immunitaire aux protéines du lait, ce qui est assez rare, au cas beaucoup plus fréquents d’un déficit d’enzyme lactase dans le système digestif.
L’allergie aux protéines du lait peut être déterminé par des tests sanguins, mais en général, celle-ci est connue chez l’adulte par la persistance de troubles qui vont des nausées, vomissements, urticaire, eczéma, asthme…
Le cas de déficit enzymatique rend « seulement » difficile la digestion du lactose (le sucre contenu dans le lait), car ces enzymes, naturellement présentes chez le très jeune enfant, font que celui-ci digère très bien le lait, puis avec l’âge ce taux enzymatique chutant, il en résulte alors, qu’on ne tolère plus ou mal  le lait…même si on adore ça ! Cette intolérance aux lactoses est relativement courante, certains thérapeutes parlent même d’intolérance naturelle chez l’adulte ! Celle-ci ne concernent le plus souvent que le lait,car les fromages et les yogourts posant rarement problème. Ce qui est acquis, c’est que si l’on ne boit pas régulièrement du lait frais, celui-ci devient complètement indigeste. On peut, comme pour le gluten ,là aussi tenter une diète pour en constater les effets, qui commencent rapidement par un nouveau confort gastrique et aussi modérer le lait à l’approche d’objectifs majeurs. Les solutions de remplacement en particulier pour le calcium sont nombreuses : les laits de chèvre et de brebis, le lait de soja , de riz, le tofu…tout en sachant que les peuples Asiatiques qui ne consomment ni lait, ni fromage sont aussi les moins sujets à l’ostéoporose !
3/ Le jus d’orange nous aide à faire le plein d’énergie…oui, mais attention. Même si la source de vitamine C des oranges est évidente, il convient de faire attention a l’acidité naturelle des agrumes. Et plus encore dans les produits à base de concentrés, saturés en conservateurs et sucres ajoutés, qui  sont des bombes d’acidité en particulier sur un estomac vide, le matin au petit-déjeuner, ou après l’effort. On évitera donc le traditionnel Jus d’orange du matin et son effet délétère sur le PH pour préférer plutôt des jus de fruit frais si possible, qui sont  alcalinisant comme le jus de pomme, de raisin ou de poire.
4/ La viande rouge est mauvaise pour la santé…non pas forcément ! Toutes les viandes sont sources de protéines et nous n’en finissons pas de découvrir tout l’intérêt des protéines dans l’alimentation des sportifs. Par contre, si toutes les viandes contiennent du fer et des vitamines (du groupe B en particulier), la valeur protéique et la concentration de graisse est très variable de 5 à 25%. Les viandes rouges grasses et les produits dérivées (charcuteries…) sont les moins intéressantes en protéines et les plus riches en graisse !  On essayera donc de privilégier les viandes rouges les plus maigres en limitant les rations à 1 à 3 fois par semaines. Par contre, pour les viandes blanches et le jambon, aucune restriction. Elles sont riches en protéines, pauvres en graisse et en calories , comme les poissons (dont les poissons gras riches en Oméga 3) et les œufs, sans oublier les légumineuses comme les lentilles par exemple, elles aussi riches en protéines.
5/ Il faut supprimer toutes les graisses dans l’alimentation …pas forcément ! Globalement on trouve deux type de graisses ou de lipides :les Acides Gras Saturés, que l’on trouve dans les graisses animales et dans l’huile de palme ou de coco et  les Acides Gras Insaturés, présents principalement dans les graisses végétales (les omega-6/9) et les huiles de poisson (les omega-3) . Les Oméga sont souvent qualifiés de «bonnes graisses» ce qui est vrai, car ils permettent de réduire le taux de triglycérides et le cholestérol sanguin . Ce mauvais cholestérol (LDL) qui par sa capacité  à adhérer aux parois artérielles augmente le risque d’accident vasculaire, tandis que le bon cholestérol (LDL), issu des Oméga participe aux modulations hormonales. Le gras de saumon, de thon, de foie de morue font partie des omega-3, en consommer peut être très utile pour augmenter son apport en bonnes graisses.  Il se trouve que dans l’alimentation occidentale, nous mangeons près de 20 fois plus d’omega-6 que d’omega-3, ce qui aurait pour conséquence directe de rendre notre organisme très inflammatoire et exposé aux douleurs articulaires, tendineuses, aux maladies encore plus graves, comme certains types de cancer. Enfin n’oublions pas le cas de l’huile de palme, qui en plus d’être saturée, est sur le plan écologique, une totale aberration , puisqu’on rase la forêt primaire pour faire pousser des palmiers à huile pendant quelques années avant de laisser un désert !
6/La règle des 3 heures est incontournable…pas forcément ! Plus l’activité est intense, moins  le sport est porté (comme le vélo ou le ski de fond), plus on aura mangé longtemps avant le départ. Donc pour un trail court avec un départ speed, on sera prudent et on prendra plusieurs heures pour digérer. Mais cela sera aussi conditionné par le type de repas (on digère plus vite un gâteau énergétique et un thé, qu’un blanc de dinde et de la  purée) , l’heure du départ ( il n’est pas forcément pertinent de se lever à 3H00 du matin pour un départ à 6H00) et du stress qui est le votre en général ( les bileux mettent deux fois plus de temps à digérer que les zens). Pour conclure il faudra trouver la solution la plus cohérente entre deux extrêmes qui pourrait être : un repas dit complet , avec un féculent et un peu de protéines, qui devra effectivement être pris 3 heures avant le départ, si celui-ci est tard dans la journée (exemple manger à 11heures pour un départ à 14 heures) et à l’opposé un simple gâteau énergétique et un thé, pris à 5 heures du matin, pour un départ à 6 heures, ce qui sera largement suffisant.
7/ Il ne faut pas boire en mangeant…c’est vrai ! Compliqué pourtant l’affaire, car le sportif doit boire beaucoup ( de l’eau , pas des binouses !), mais si l’on boit trop en mangeant , le bol alimentaire devient plus gros, réduisant l’effet des sucs digestifs et augmentant le temps de digestion et la fatigue métabolique associée. On boira donc peu en mangeant ,mais plutôt  20 mn avant et surtout à volonté , au minimum 1.5 l par jour, entre les repas, sans oublier le matin au réveil, car la nuit nous déshydrate.
8/ Un verre de vin rouge à chaque repas, c’est bon pour la santé…désolé mais non ! C’est un peu comme la petite bière, qui serait bonne pour la récupération, grâce a ses sels minéraux. Boire un petit coup c’est juste bon, mais pas bon pour la santé, au mieux , ce n’est pas nocif. Un verre d’alcool, quel qu’il soit : vin rouge ou blanc, un apéritif, un alcool fort, une bière…c’est au final 10 g d’alcool et l’alcool est toxique. Disons qu’à faible dose, environ 10g par jour, son effet toxique est nul, donc on peut boire un peu sans se faire de mal. Mais alors, ce « trench paradoxe » qui a fait couler tant d’encre ? Il s’agit d’une constatation statistique qui a mis en comparaison le régime alimentaire des habitants du Sud Ouest de la France, qui bien que comportant une part significative de graisses animales dans leur alimentation, font bien moins d’infarctus que les Américains. 315 pour 100 000 pour les Ricains, 145 pour l’ensemble des Français et 80 seulement pour le Basques et les Landais ! Les scientifiques ont avancé un ensemble de raisons, dont les polyphénols contenus dans les vins rouges de Bordeaux, qui sont plutôt tanniques. Il n’en fallait pas plus au lobby du vin, pour saisir l’argument et dire « qu’un peu de vin c’est bon pour la santé », ils ont là, le bénéfice du doute. Désolé donc, c’est bon de boire un petit coup, sans doute, mais il n’y a pas d’avantage à cela et dans les 24H avant une course, l’alcool peut être considéré comme indigeste, on l’évitera donc totalement.
9/ Les compliments alimentaires sont une forme de dopage… Absolument pas ! Pas mal d’affaire de contrôle anti-dopage ont semé le doute. Chaque fois qu’un bandit notoire se fait attraper au contrôle pour anabolisant par exemple, l’excuse tombe à chaque fois : le produit était présent dans une poudre protéinées achetée sur internet ! Il est vrai que certains produits made in USA ,destinés principalement au marché des culturistes, contiennent des anabolisants. Mais ceux-ci ne sont pas cachés, c’en est même l’argument principal de vente. Les compléments alimentaires présents sur le marché Français, sont conforme à une réglementation stricte, ils comportent des protéines, des vitamines, des acides aminés, des sels minéraux, de la sérotonine ou des acides gras essentiels …Ils ne sont pas du tout dans le registre du dopage et ne sont pas interdits. Maintenant, est-ce qu’on s’autorise tout ce qui n’est pas interdit ? Il appartient à chacun de faire la part des chose et se mettre en accord avec sa propre déontologie du sport. Nous pratiquons un sport hors normes,  notre alimentation doit-elle être normale stricto sensu? Vaste débat ? Est-ce que sortir du plan :jambon et pâtes à l’eau est frauduleux ? Et les germes de blé et la levure de bière, les graines germées autorisés ou pas ?
10/ Les gels, les barres, les poudres énergétiques apportent toutes le même type d’énergie…pas exactement ! Les produits énergétiques ont considérablement évolué ces dernières années, principalement en diminuant leur effets allergènes et en différenciant les types de sucres. Alors que la première génération de produit, ne proposait que du glucose ou du fructose (des sucres à assimilation rapide),  l’apparition des malto-dextrines (communément appelées les nouilles liquides), qui avec un IG (indice glycémique) bas, évite un pic d’insuline et permettent une diffusion lente du glycogène vers les muscles au travail. Globalement les barres et les gels sont selon les fabricants destinés à un apport en sucres rapides, on les prendra régulièrement à l’effort. Les boissons aux malto-dextrines seront préférées avant la course.
Pour conclure, modifier radicalement son alimentation, comme  faire une diète complète ou partielle et momentanée d’un aliment ne doit se faire qu’au regard de son niveau de pratique et son niveau d’exigence. L’alimentation du sportif est un des nombreux  facteurs de la performance, qui vont de  l’ entraînement, au  matériel, à la stratégie, à l’approche psychologique …. Construire une approche équilibrée de son activité sportive, n’est possible que si l’on a  le même niveau d’exigence, au regard de chacun des facteurs qui la compose, sans en négliger aucun.
Pour autant, les curseurs doivent être  poussés intelligemment et  en relation avec son propre niveau de pratique. Ainsi, dans le cadre d’une pratique de loisir, on visera une gestion de l’alimentation qui garantit la préservation de la santé où l’on mangera de tout, sans trop sacrifier aux règles sociales . Dans le cas d’une  approche plus ambitieuse et ce peut être le cas pour parfois simplement être finisher, on entrera dans une autre logique, celle de la haute performance où le plaisir de manger est assujetti au résultat. Il existe afin une troisième voie, celle qui visant l’optimisation de la performance, amène un confort de vie et une amélioration de la santé, et ça qu’on aille vite ou pas, peut intéresser tout le monde.
-Jenkins et al. Simple and complex carbohydrate : lack of glycemic difference between glucose and glucose polymers. J Clin Nutr Gastroenterol. 1987
-Neufer PD, Costill DL, Fink WJ, Kirwan JP, Fielding RA, Flynn MG. Effects of
exercise and carbohydrate composition on gastric emptying. Med Sci Sports Exerc.
1986

-Bonnes & mauvaises graisses » de Doris Fritzsche et Ibrahim Elmadfa aux Editions Vigot

trails-endurance                                                                                   outdoorexperiences

1 commentaire:

Unknown a dit…

Encore un site avec de l'information de merde probablement écrite par un carniste lol